Étude : Culturecheznous et confinement, le tremplin digital

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8 400, c’est le nombre de participants au mouvement #CultureChezNous lancé le 18 mars par le ministère de la Culture. Le bilan fourni par l’Observatoire Social Média traduit une pratique désormais maîtrisée et un élan conversationnel inédit.

S’informer, briser l’isolement, manifester sa solidarité, faire connaître ses activités… Pendant le confinement instauré le 17 mars, le trafic Internet a augmenté de 70% en France, de 30% sur Wikipédia. Facebook, Instagram et YouTube figurent ainsi sur le podium des sites les plus consultés, avec une hausse de 10% des connections.

Vendre des livres sur EBay, ouvrir une boutique sur Instagram, tourner des « live » et engager sa communauté… Nombreux sont ceux qui se sont saisis des outils numériques pour se lancer dans un commerce digital jusqu’à lors plutôt délaissé. « Le confinement a boosté les ventes de 10 % chez certaines enseignes sur des objets de petite taille, facilement expédiables », témoigne ainsi Bertrand Malvaux, président de la Chambre nationale des experts spécialisés.

Les initiatives plus commerciales des foires et des galeries se sont quant à elles davantage concentrées sur des «  viewing rooms », conçus pour combler le vide. C’est notamment la réponse apportée par la foire Art Basel Hongkong à ses exposants, privés de la 8e édition de la franchise Art Basel implantée en Asie qui aurait dû se tenir à 19 au 21 mars. Le 20 mars, elle a ainsi mis en ligne 235 visites virtuelles. Même stratégie pour Paris Gallery Weekend, dont les dates ont été reportées du 2 au 5 juillet : « Les collectionneurs étrangers ne pouvant se rendre en France, nous allons développer des viewing rooms afin qu’ils puissent au plus tôt repérer les œuvres », explique Marion Papillon, présidente du Comité professionnel des galeries d’art, organisatrice de l’événement.

Certaines galeries françaises ont su maintenir la cadence d’un post par jour sur Intagram (Christophe Gaillard 4K ou Esther de Beaucé 2K) ou d’une newsletter quotidienne (galerie Loeve&Co ou galerie Françoise Livinec). Dans un tweet du 2 mai, la galerie américaine Gagosian annonce avoir réalisé un chiffre d’affaires de 3 millions d’euros, avec 18 œuvres vendues online en 22 jours. Le levier de la réussite ? Une campagne de production éditoriale multicanal associée au hashtag #GagosianSpotlight. Chaque semaine, à partir du 8 avril, un artiste a été mis à la une, les collectionneurs disposant de 48 heures pour acquérir la pépite du moment.

De nombreuses institutions ou acteurs ont eux aussi misé sur cette ultime vitrine pour faire connaître leurs activités à un public le plus large possible. Ainsi, lancé le 18 mars par le ministère de la Culture, le portail numérique culturecheznous.gouv.fr a rassemblé et diffusé la programmation dématérialisée de 500 institutions, des plus connues – le Louvre, la Cité des Sciences ou le Centre des Monuments Nationaux – aux plus confidentielles comme le musée de Pontaven ou l’école des Beaux-Arts de Caen. Repris dans les secteurs des arts (50%), de la musique (19%), du théâtre (16%), de la littérature et de la bande dessinée (14%), le hashtag #CultureChezNous a fédéré 8 400 participants et produit plus de 120K publications en six semaines. Le mot-dièse est ainsi venu en écho du très populaire #RestezchezVous (1,5M mentions). Un pic conversationnel a été enregistré sur Twitter le 22 avril lorsque l’historien suisse Jérémie Ferrer-Bartomeu @FerrerBartomeu a ressorti des archives une attestation de sortie dérogatoire durant la peste, datant de 1720, qui ensuite a fait le tour du Web.

Cours en direct de danse, concours de coiffures, photographies de dampés, ces tenues traditionnelles mauritaniennes, perfectionnement de la langue française, suggestion de livres numériques à télécharger gratuitement… Le Mali, le Cameroun et le Maroc ont été les pays les plus actifs sur les vingt participants, représentant 35% des publications en Afrique.

Parmi les premiers de cordée nationaux, le musée d’Orsay à Paris s’est particulièrement illustré par une présence active sur les réseaux sociaux, avec notamment cinq publications par jour. Résultats : trois mille abonnés gagnés sur Twitter en deux mois pour atteindre le chiffre de 715K début mai. Les raisons d’un tel coup d’accélérateur ? L’intervention, chaque semaine, d’influenceurs – comme le critique d’art suisse Hans Ulrich Obrist, directeur artistique de la Serpentine Gallery à Londres, suivi par 32 000 personnes sur Twitter – venus commenter un choix d’œuvres #DansNosCollections ; mais aussi la mise en avant de podcasts jeunesse par le Musée d’Orsay et une trentaine de vidéos sur YouTube réalisées par des étudiants de l’école des Gobelins qui a également séduit le jeune public #petitsmo.

Au-delà d’une présence vidéo, la tendance des podcasts s’est affirmée avec une augmentation de 72% dès l’annonce du confinement. Ainsi, « le son de peinture », initié par Audiovisit, leader des solutions de l’audio-guidage, avec le soutien de Clic France, a présenté des chefs-d’œuvre de l’art moderne au rythme d’une publication de deux minutes par jour. Ainsi, chacun a pu écouter l’analyse de La Chambre de Van Gogh à Arles (1889) et apprendre que la chambre de la Maison jaune où dormait Vincent était bien en forme de trapèze : 1,8K écoutes après une semaine de mise en ligne.

Place au participatif ! De nombreux jeux-concours ont été lancés, toujours appuyés du hashtag #CultureChezNous, l’un des plus relayés étant #ArtEnQuarantaine sur Instagram, version française de #tussenkunstenquarantaine (« Entre art et quarantaine ») lancée par les Néerlandaises Anneloes Officier, Floor de Weger et Tessa Kerman : une invitation à interpréter chez soi – et avec les moyens du bord – des tableaux à partir d’œuvres choisies dans les collections de musées français. Le portrait de Berthe Morisot par Manet a ainsi, par exemple, trouvé son modèle grâce à @boname_costumes, atelier de confection de costumes d’héroïnes du XIXe siècle, générant 1,5K de « j’aime »; Autre réussite, le concours #FenêtreOuverte initié par la Maison Européenne de la Photographie à Paris, mettant en scène la lumière à travers une vitre, sur une idée de la photographe Marguerite Bornhauser qui a généré 17K de contributions. De nombreuses autres initiatives ont été lancées par des institutions régionales ou locales, comme le kit d’exposition #HomeFromHome lancé par le Château de Montsoreau-Musée d’art contemporain (Maine-et-Loire) pour une exposition de Art & Language à installer chez soi.

 

 

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